JALLY KEBBA SUSSO, LE GRIOT DES NATIONS UNIS DU SON

A la croisée des genres, qu’il aime tant redéfinir, Jally Kebba Sussu cuisine une musique infusée de ses voyages, de ses rencontres et de la tradition des griots, dont il a hérité. Refusant de rentrer dans une case, il promet de faire trembler le Focus Africa festival, avec son groupe Manfing Sabu. Descendant d’une dynastie de griots courant sur 64 générations, Jally Kebba Susso transmet cet héritage, en repoussant les frontières de la’lusique et des genres. Portant cette tradition musicale sur les scènes internationales, depuis ses 13 ans, il raconte son amour de la fusion. Son dernier EP ” Freedman “, créé avec le label français Mawimba, en est d’ailleurs un bon exemple. 

Sur la scène du Focus Africa festival ce samedi 29 juillet, il nous propose une balade dans les rues de Londres, à la sortie des répétitions. Retrouvez i-dessous l’interview du 27 juillet 2023, retranscrite en français. 

“Je joue de la kora. Et quand je parle de kora, je parle de l’instrument traditionnel africain joué par les griots. Et les griots sont des historiens, des artistes, des conteurs et des activistes des temps anciens, de l’Afrique avant la colonisation. 

Je me sens privilégié de faire partie de cette histoire. Je ne me sens pas uniquement comme un musicien. J’ai le sentiment que la musique a un projet qui me dépasse. Je suis la continuité de mes ancêtres. 

Un petit élément d’une grande tradition 

Pour moi, la vie de musicien c’est d’explorer. C’est d’apprendre du vaste horizon. Et avant que je ne quitte l’Afrique, c’était la même chose parce qu’il y a toujours eu une fusion de musiques : hip-hop, jazz, blues, rock, orchestre, folk, bala. Je ne m’enferme pas dans un genre. Je n’ai pas commencé cela. J’ouvre les frontières. Mais je suis un élément. Un petit petit petit élément microscopique de mes ancêtres. 

Cela nous tient vraiment à coeur parce que c’est une tradition, pour moi, tout particulièrement. Je suis très prudent concernant son [la kora] expansion, pour ne pas qu’elle perde son originalité et son but. Car si nous perdons cela, cela deviendra seulement un instrument. Et si cela ne devient qu’un instrument, qui en tire les bénéfices ? 

Du confidentiel au mainstream 

Nous pouvons tous observer l’impact qu’a la musique africaine aujourd’hui. Elle en avait déjà mais dans des poches, pour de plus petites poches. Maintenant ce qui est sort est mainstream et est sur les grandes scènes. Si tu vas en Afrique aujourd’hui, l a manière de consommer la musique est différente. Je veux dire que l’audience change. La musique africaine est jouée dans des clubs. Ce n’était pas comme cela avant. Ce n’était pas cool d’être un musicien africain. Mais maintenant, c’est vraiment cool. C’est vraiment authentique. (Rires) 

Mais cela a marché. J’ai été ici ces deux dernières décennies, dans les scènes musicales londoniennes. Je crois que la compréhension et le respect mutuel que nous avons construit à travers la musique, sont les raisons pour lesquelles la musique change drastiquement actuellement. Parce que les gens voient le talent et non le lieu d’où tu viens. Encore aujourd’hui, il reste du travail. 

L’amour de la fusion 

Là d’où je viens, nous avons tellement de riddims qui peuvent aujourd’hui être comparés à différents genres de musique. Avant que je n’arrive en Europe, ces signatures musicales avaient déjà voyagé vers l’Europe. C’est comme cela qu’encore la mélodie part et est identifiée comme ceci ou comme étant du blues ou de la folk. Mais en Afrique, cela n’est pas vraiment pertinent. Dans le jazz, on peut entendre du blues. Il y a beaucoup de fusions de différentes couleurs, de multiples rythmes,. Donc quand j’entends de la musique, j’entends un melting pot. Les Nations unies du son. 

Concernant la musique, je ne pense aux genres. Je pense à la musique et si vous venez, c’est exactement ce que vous aurez. J’aime mélanger les sonorités. J’aime voyager autour du monde. Venez samedi. Ce sera une soirée fun. Attendez-vous au vacarme. Je joue avec tout mon groupe. Donc venez avec vos dancing shoes, prêts à danser.”